Bien que la Programmation Pluriannuelle de l’Énergie (PPE) présente des objectifs à 2028 ambitieux concernant le développement de la filière photovoltaïque, elle ne se donne pas pour autant les moyens de les atteindre. L’équipe Hespul propose 3 mesures phares.
En réponse à la consultation publique sur le projet révisé de PPE.
Mesure 1 : Élargir le périmètre de l’obligation d’achat : se donner les moyens d’atteindre les objectifs de la PPE tout en maîtrisant les dépenses publiques
En théorie, le mécanisme d’appel d’offres ne présente que des avantages : la mise en concurrence permet d’obtenir les coûts les plus bas, les volumes à installer peuvent être contrôlés et le poids pour les finances publiques reste ainsi prévisible.
Pourtant, l’année 2019 remet en question cette théorie. Alors que les coûts du photovoltaïque sont en constante diminution, les tarifs de l’appel d’offres bâtiment ont augmenté de 20 %, celui de l’appel d’offres au sol de 10 %, les projets lauréats accusent de nombreux retards et il est probable qu’une part non négligeable d’entre eux soient finalement abandonnés : les avantages que sont la maîtrise des coûts et la prévisibilité ne sont donc pas au rendez-vous tandis que les désavantages que sont l’encouragement à la spéculation et la lourdeur de la procédure prennent au contraire le pas.
Alors que la PPE publiée récemment prévoit une multiplication de la puissance annuelle installée par 3 d’ici 2023 et par 4 entre 2023 et 2028, ce constat d’échec doit conduire à une profonde modification du dispositif, à commencer par le relèvement du seuil des appels d’offres de 100 kW actuellement à 500 kW soit le plafond de la règlementation européenne, ce qui ne devrait pas poser de problèmes de contrôle par la puissance publique du coût du dispositif : les services de l’État étant très bien informés de l’évolution des coûts de la filière, ils peuvent faire évoluer le tarif d’achat en fonction de ceux-ci et encadrer la rentabilité des projets de manière à éviter la création d’une rente financée sur deniers publics.
Pourtant, la PPE révisée continue à favoriser le mécanisme d’appels d’offres avec un volume ciblé pour les tarifs d’achat en guichet ouvert stagnant à 300 MW/an contre près de 3 GW/an pour les appels d’offres. Afin de remédier à ces dysfonctionnements, nous proposons que :
- Les tarifs d’obligation d’achat en guichet ouvert bénéficient à toutes les installations PV de moins de 500 kW.
- Les 0,45 GW/an alloués à la famille 1 de l’appel d’offres bâtiments soient intégralement affectés au guichet ouvert pour les installations de moins de 500 kW.
Ceci porterait ainsi le volume sous obligation d’achat pour les installations de moins de 500 kW à 0,75 GW par an.
Mesure 2 : Diminuer les coûts administratifs en mettant en place un guichet unique
Une partie non négligeable du travail des développeurs et des installateurs consiste à cocher des cases sur des documents administratifs. Cet état de fait n’est pas une fatalité, il est d’abord le fruit d’un manque de communication entre les différentes administrations. Ce problème qui pèse sur le coût des projets pourrait être résolu par la création d’un guichet unique centralisant l’ensemble des démarches dès la phase de l’autorisation d’urbanisme (déclaration de travaux ou permis de construire) jusqu’à la signature du contrat d’achat. À la différence du système actuel, ce guichet unique devrait être entièrement pensé pour faciliter au maximum la tâche de l’usager et créer ainsi un véritable choc de simplification, le nombre de documents demandés pouvant être divisé par deux.
Mesure 3 : Régionaliser les tarifs d’achat : une mesure vertueuse et pas forcément plus coûteuse pour le contribuable !
Les pouvoirs publics confirment leur soutien aux installations au sol au détriment des installations sur bâtiment. Or, si les projets au sol peuvent être vertueux lorsqu’ils sont développés sur des friches ou des délaissés, un développement mal encadré pourrait encourager l’artificialisation de terres agricoles.
D’après l’ADEME, le gisement sur ces friches, délaissés et parking serait d’environ 50 GW, à mettre en regard de la cible haute de 25 GW au sol en 2028. Si cela est plus que suffisant pour répondre aux objectifs de la PPE, le système de soutien actuel avantage fortement les grands projets situés dans le Sud de la France. Or, d’après l’étude ADEME, l’essentiel du potentiel sur friches se concentrerait dans le Nord et concernerait des projets de plus petite taille, entre 500 kW et 2,5 MW contre une moyenne de 8 MW au dernier appel d’offres sol de la CRE.
L’atteinte des objectifs de la PPE nécessite donc une profonde réorganisation des mécanismes de soutien. Afin de permettre aux projets sur friches de se développer là où elles existent, les tarifs d’achat doivent tenir compte de la répartition réelle du gisement, d’une part en étant régionalisés pour compenser le moindre ensoleillement et favoriser les projets de moyenne taille compris entre 500 kW et 2,5 MW. Enfin, les tarifs des projets sur friches, délaissés et parking devraient être davantage bonifiés, la course actuelle au gigantisme ne pouvant qu’accroître une artificialisation des terres déjà critique.
Cette régionalisation des tarifs ne coûterait pas forcément plus cher à l’État, comme le montrent les résultats de l’appel d’offres de Fessenheim limité au département du Haut-Rhin puisque les tarifs demandés sont comparables à ceux des appels d’offres nationaux malgré un ensoleillement inférieur à la moyenne nationale !