Après avoir raccordé le premier kilowatt photovoltaïque au réseau électrique français il y a 30 ans, Hespul se projette sur les 30 prochaines années et présente sa « vision idéale » pour l’avenir de la filière en France.
Aujourd’hui, 14 juin 2052, 60 ans jour pour jour après la mise en service du premier kilowatt photovoltaïque raccordé au réseau électrique français, c’est une puissance cent-quarante millions de fois supérieure qui alimente ce dernier.
Grâce à une politique ambitieuse de sobriété et des investissements massifs dans l’efficacité énergétique, la France consomme moitié moins d’énergie qu’en 2022.
L’électrification de certains usages dans la mobilité (véhicules légers, vélo assistés…), le bâtiment (pompes à chaleur à haut rendement) et l’industrie (sidérurgie, process …) a entraîné un doublement de la part de l’électricité dans la consommation totale d’énergie (de 25% à 50% environ), mais une augmentation modérée en valeur absolue (+15 à +20% par rapport à 2022).
Avec 140 GW installés, le photovoltaïque produit 170 TWh, soit un tiers du mix électrique et plus de 15% de la production totale d’énergie du pays.
Toutes les filières renouvelables, électriques, thermiques ou autres, se sont par ailleurs fortement développées en parallèle, si bien que l’approvisionnement énergétique de la France est désormais 100 % renouvelable.
Les freins au déploiement du photovoltaïque levés dans la décennie 2020-2030
Pensé à l’origine pour aller du producteur vers le consommateur, le réseau a évolué sur les plans matériels et opérationnels. Il remplit désormais pleinement son rôle de collecte de la production : l’électricité circule désormais sans difficulté dans les deux sens.
Les délais et les coûts de raccordement ont été considérablement réduits grâce à la planification territoriale qui permet d’anticiper l’arrivée de nouveaux producteurs, à l’adaptation des règles techniques de raccordement et à la simplification des procédures.
Les systèmes photovoltaïques fournissent en outre au réseau électrique des services-système et des moyens de flexibilité grâce aux fonctionnalités avancées des onduleurs qui les équipent, limitant ainsi les coûts d’adaptation du réseau et de mise en place de moyens de stockage pour compenser l’intermittence de la production.
Les procédures administratives ont connu un choc de simplification, sans rogner pour autant sur les exigences environnementales. L’homogénéisation des processus d’instruction par les services de l’État a permis de réduire la durée moyenne de développement des projets pour la rendre comparable à celle observée chez nos voisins européens.
Un guichet unique a été créé pour les petits et moyens producteurs afin de centraliser et de faciliter l’ensemble des démarches, depuis les demandes d’autorisation d’urbanisme jusqu’à la mise en service des installations.
La pose de panneaux photovoltaïques en toiture ou en façade est systématiquement étudiée lors de travaux touchant à l’enveloppe des bâtiments, que ce soit en rénovation ou en construction neuve. Tous les bâtiments sont ainsi devenus « PV-ready » et peuvent accueillir du photovoltaïque sans travaux supplémentaires.
La filière professionnelle porte un dispositif de formation diplômante clairement défini, transparent et collégial. L’obligation de qualification et la reconnaissance des compétences de tous les intervenants a permis d’améliorer la qualité globale des installations, de faire disparaître le fléau des escroqueries au photovoltaïque qui avait miné le secteur entre 2005 et 2025 et de réduire quasiment à zéro l’abandon de projet en cours de route.
Une industrie photovoltaïque relocalisée en Europe
L’Europe a su tirer rapidement les leçons de la crise géopolitique mondiale déclenchée en 2022 par l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Une partie significative de son Plan de relance a ainsi été consacrée à l’accélération du processus de relocalisation de son industrie photovoltaïque sur le continent.
Le marché européen est passé en quelques années de 18 à 45 GW de nouvelles installations par an. Pour y répondre, la production européenne de silicium de qualité photovoltaïque a été multipliée par trois et est devenue largement excédentaire. En parallèle, une dizaine de « giga-factories » ont été construites. Celles-ci, basées sur des technologies de rupture maîtrisées par l’industrie européenne comme l’hétérojonction, produisent la quasi-totalité des wafers, cellules et panneaux consommés sur le continent.
Les fabricants d’onduleurs ne sont pas en reste : ils ont retrouvé leur place historique de leaders mondiaux grâce à de gros efforts de R&D et de standardisation en étroite collaboration avec les gestionnaires des réseaux. En effet, ces derniers ont compris tout le parti qu’ils pouvaient tirer de la révolution copernicienne que représente l’électronique de puissance : la notion de « réseau intelligent » a enfin pris tout son sens.
Si l’on ajoute les dizaines de milliers d’emplois dans les PME et TPE qui assurent un peu partout dans le territoire la conception, l’installation et l’exploitation des systèmes photovoltaïques, on ne peut que se réjouir du fait que la filière participe ainsi pleinement à la création de valeur et d’emplois en France et en Europe. Ces avancées justifient les investissements publics qui ont stimulé l’éclosion de la filière depuis le début du XXIème siècle.
Le bénéfice d’une électricité bon marché et accessible à tous
Malgré la soudaine hausse des coûts liée à la crise de 2022, le photovoltaïque a repris sa trajectoire historique de baisse de son coût de revient. Il a ainsi confirmé sa place de source d’électricité la plus compétitive à l’échelle mondiale comme en France, suivie de près par l’éolien terrestre et maritime.
Grâce au déploiement massif de ces deux filières, le coût moyen de production du kilowattheure a pu être maintenu à un niveau raisonnable ; cela en tenant compte des besoins de stockage et malgré les coûts liés à l’adaptation du réseau pour favoriser la collecte d’une production de plus en plus décentralisée. Cette stabilité structurelle des prix à un niveau relativement bas a contribué à sortir des millions de personnes de la précarité énergétique et à fournir au plus grand nombre un confort de vie acceptable.
Une gouvernance partagée entre citoyens, entreprises, collectivités et État
La possibilité d’investir dans les systèmes photovoltaïques et d’en tirer des bénéfices n’a volontairement pas été laissée aux seules grandes entreprises du secteur de l’énergie : les collectivités territoriales, le monde agricole, les entreprises de toutes tailles, les particuliers, individuellement ou regroupés au sein des collectifs citoyens, ont pris une part prépondérante du marché.
L’État a pleinement joué son rôle en se donnant des objectifs ambitieux et en assumant une mission de facilitateur. Il a pour cela mis en en place un cadre administratif simplifié encourageant la contribution de chaque territoire à la production d’énergie renouvelable. Ce sont toutefois principalement les collectivités territoriales, en lien direct avec les acteurs locaux, qui sont à la manœuvre pour le développement des énergies renouvelables.
Malgré son poids dans le mix énergétique, le photovoltaïque est par nature fortement décentralisé et mobilisable en tous points du territoire : il n’est pas concentré dans des grandes zones au détriment d’autres usages essentiels comme l’alimentation, ou de la biodiversité. Il est en revanche systématiquement intégré aux projets d’aménagement et de construction ou de rénovation d’infrastructures.
La structure de ses coûts, modérés et concentrés sur l’investissement initial, le rend accessible sans risque à tout un chacun. Il offre de ce fait l’opportunité pour l’épargne des ménages d’un placement populaire plein de sens et plus intéressant que le traditionnel Livret A.
C’est pourquoi on observe une part globale de plus de 20 % d’investissement citoyen dans les projets de moyenne et forte puissance, que ce soit en direct ou via des fonds dédiés sur le modèle d’Énergie Partagée créé en 2009. Cela contribue à une répartition plus égalitaire de la valeur créée et à une très bonne appropriation des projets par les riverains.
Une filière toujours plus exemplaire sur le plan environnemental
Les réseaux électriques accueillent aujourd’hui sans souci une production photovoltaïque massive, issue pour moitié d’installations en toiture de petite et moyenne puissances (de quelques kilowatts à quelques centaines de kilowatts) dispersées sur l’ensemble du territoire, et pour moitié de parcs au sol prioritairement sur sites pollués, friches industrielles et délaissés d’infrastructures, ainsi que d’ombrières de parking.
Lorsque cela s’est avéré pertinent, les parcs au sol sur terrains naturels, agricoles ou forestiers ont fait l’objet, dans le cadre d’une réglementation rigoureuse visant à limiter strictement l’artificialisation des sols, d’une large concertation, d’études préalables poussées et d’un suivi attentif permettant de s’assurer du maintien, et même dans certains cas de l’amélioration, de la biodiversité sur les parcelles concernées et aux alentours.
Objet de beaucoup d’espoir au début des années 2020, l’agrivoltaïsme a trouvé sa place dans la palette des applications pertinentes. De multiples installations au sol ont ainsi été développées en synergie avec les activités agricoles, de manière non pas à s’y substituer, mais à y apporter un réel bénéfice agronomique.
Déjà bas-carbone dans les années 2020, le photovoltaïque a poursuivi sa rapide évolution technologique. En améliorant d’année en année son bilan carbone et son empreinte matière, il est devenu - avec l’éolien - la technologie de production d’énergie la plus vertueuse.
La mise en place de normes au niveau européen a permis de favoriser l’éco-conception des modules. Leur recyclage, déjà significatif en 2022, s’est généralisé depuis. Les matériaux issus des modules recyclés sont directement réutilisés pour en fabriquer de nouveaux.
En amont du recyclage, une filière de réemploi des modules et des onduleurs déposés mais encore performants a été créée à l’échelle nationale. Des ateliers de remise en état ont été ouverts dans toutes les régions françaises et des centaines d’emplois créés dans le domaine de l’ESS. Encadré par des normes adaptées et des certificats de qualité, ce marché secondaire offrant les garanties nécessaires à ses clients est un bel exemple de sobriété.
Des promesses effectivement tenues !
Si en 2022, le défi paraissait encore bien difficile à surmonter, les freins à la massification du photovoltaïque ont finalement pu être levés. L’énergie solaire a permis de renforcer l’indépendance énergétique de l’Europe ; elle a participé à sa réindustrialisation et à l’atteinte de ses objectifs de neutralité carbone. La gouvernance et les revenus issus de la production d’énergie n’ont jamais été autant partagés entre les acteurs, notamment citoyens. Quant à la qualité environnementale, elle s’est renforcée d’année en année grâce à une amélioration technologique continue, à l’éco-conception, au recyclage, au ré-emploi et au ciblage des projets dans les zones les plus pertinentes sur le plan environnemental. Découvert deux siècles plus tôt par le français Antoine-Edmond Becquerel, le photovoltaïque a tenu ses promesses et est encore promis à un avenir radieux.