
Le développement du photovoltaïque est soutenu par l’État via deux principaux mécanismes, selon les puissances des installations : obligation d’achat ou complément de rémunération.
Pour se mettre en conformité avec les règles européennes, l'État français envisage de baisser le seuil entre l’obligation d'achat et le complément de rémunération de 500 kWc jusqu'à présent, à 200 kWc au plus tard au 1er janvier 2026.
Dans le cadre d’une consultation publique sur ce projet, Hespul a défendu un seuil à 250 kVA, plutôt que 200 kWc, pour aligner les seuils réglementaires avec les seuils techniques et pour tenir compte des contraintes opérationnelles induites : frais et complexité de gestion, mise en place de dispositif de coupure à distance, etc.
Pour rappel :
- L’obligation d’achat consiste en un achat direct par un acheteur obligé de l’électricité produite à un tarif fixé par arrêté.
- Le complément de rémunération (CR) est une prime à la production versée au producteur d’énergie renouvelable en complément de la vente sur le marché de l’électricité qu’il a produite. Cette prime est proportionnelle à l’énergie produite et calculée comme la différence entre un tarif de référence, assimilable au tarif d’achat actuel, et un prix de marché de référence.
Le projet de décret permet également de rendre possible la publication d’un nouveau dispositif de soutien public qui est un arrêté spécifique aux installations photovoltaïques au sol de moins de 1 MWc.
Découvrez ci-dessous la contribution d'Hespul à la consultation publique :
Partie 1 - Concernant l’arrêté dédié au photovoltaïque au sol de moins de 1 MWc :
Hespul salue la publication prochaine de cet arrêté fortement attendu par de nombreux acteurs, qui correspond à des projets locaux de taille modérée, et qui permettra d’exploiter un gisement foncier pour réaliser des installations compétitives. Hespul appelle à la publication de cet arrêté dans les plus brefs délais. Hespul profite aussi de cette consultation pour réaffirmer que ce dispositif de soutien est particulièrement adapté à l’expérimentation de la mise en œuvre d’une modulation tarifaire géographique au-delà du plafonnement, et qu’il est nécessaire d’accompagner l’arrivée de volumes importants lors des premiers trimestres par un gel de la dégressivité, ou tout autre dispositif adapté.
Partie 2 - Concernant le choix de généraliser le complément de rémunération en photovoltaïque à partir de 200 kWc et de restreindre l’obligation d’achat en dessous de 200 kWc :
Hespul considère que le seuil de 200 kWc pour l’entrée en vigueur du complément de rémunération n’est pas adapté au système électrique français et qu’abaisser ce seuil à ce niveau est prématuré. Alternativement, Hespul propose un seuil à 250 kVA, qui correspond à la limite technique entre les domaines en basse et moyenne tension (BT et HTA).
Les arguments de cette proposition alternative sont déclinés en 3 axes :
- Axe 1 :
Les lignes directrices mentionnent un seuil à “200 kW” maximum. Hespul appelle à aligner les seuils tarifaires sur les seuils techniques issus de l’arrêté du 9 juin 2020 et relatifs aux puissances électriques installées, ce que permet l’unité en kW des lignes directrices. Ensuite, Hespul appelle à aller au-delà d’une lecture stricte des lignes directrices, et d’expliciter auprès de la Commission européenne pourquoi un seuil légèrement supérieur a été choisi, en cohérence avec les spécificités techniques du réseau français, la limite technique entre BT et HTA étant à 250 kVA.
- Axe 2 :
En passant au complément de rémunération, le choix est de mettre en place un système plus complexe que celui de l’obligation d’achat, ce qui peut constituer un frein au développement de projets pour de nombreux acteurs du photovoltaïque, alors même que les vertus d’une généralisation du soutien en complément de rémunération pour des installations de plus petites puissances ne sont pas prouvées. En particulier, la valorisation de l’électricité sur les marchés demande la plupart du temps aux producteurs de confier cette tâche à un agrégateur. Au-delà du temps nécessaire à la contractualisation et de la difficulté à choisir qualitativement un agrégateur (processus à renouveler régulièrement), cela ajoute une incertitude relative aux coûts d’agrégation qui sont amenés à évoluer sur la durée du contrat, d’autant que les acteurs présents sur ces typologies de projets ne sont pas experts des marchés de l’énergie. De plus, la gestion du complément de rémunération augmente le travail contractuel et de facturation/versement d’EDF OA, ce qui constitue une sous-optimisation du système de soutien public.
- Axe 3 :
Jusqu’à présent, la mise en place d’un soutien en complément de rémunération pour le photovoltaïque semble corrélée à un système de gestion des prix négatifs. Hespul souhaite d’abord rappeler qu’un traitement des prix négatifs peut être compatible avec l’obligation d’achat, même si cela n’est pas souhaitable pour les petites et moyennes puissances pour les raisons détaillées ci-dessous.
Ensuite, Hespul rappelle que l’augmentation des heures de prix négatifs est un signal prix indiquant une nécessité de développer des flexibilités, dont la flexibilité de la production renouvelable fait partie, et est à mettre en regard des autres mesures (ex : flexibilité de la demande, stockage, flexibilités des autres moyens de production etc.). De nombreuses mesures sont déjà en œuvre sur les installations renouvelables (ex : installations nouvelles en complément de rémunération qui ont une incitation forte à se couper en cas de prix négatifs) ou en train d’être mises en place notamment sur les plus grandes installations (ex : demande aux installations existantes en obligation d’achat et de grande puissance de se déconnecter en cas de prix négatif, moyennant une compensation à définir).
Enfin, il est peu opérationnel de généraliser la gestion des prix négatifs par la coupure en complément de rémunération pour les installations photovoltaïques raccordées en basse tension (BT), étant entendu que ni les gestionnaires de réseaux ni les acheteurs obligés ne géreront ce pilotage. Pour le producteur, gérer une déconnexion nécessite de mettre en place des dispositifs de communication qui ont un coût important et un risque de ne pas fonctionner. Les REX d’exploitation montrent en effet que les problèmes de communication sont fréquents. L’objet utilisé pour réaliser une coupure en HTA est un SCADA, qui est un automate dont le coût d’installation et de programmation est trop important pour des installations de petites tailles. Ainsi, les producteurs en BT utilisent des dataloggers, qui sont des outils simplifiés pour pouvoir faire du transfert de données et ainsi suivre à distance l’installation. Cependant, ces dataloggers ne sont pas adaptés ni sécurisés pour permettre une coupure à distance. Ainsi, il convient de faire émerger des dispositifs intermédiaires entre SCADA et dataloggers, qui sont pour l’instant à l’étape d’expérimentation. De surcroît, cette coupure à distance viendrait fortement renchérir le coût d’exploitation pour des installations de taille modérée du fait de la gestion humaine, ce qui est peu favorable d’un point de vue technico-économique.
Pour toutes ces raisons, Hespul préconise une limite entre obligation d’achat et de complément de rémunération à 250 kVA, plutôt que le seuil de 200 kWc du projet de décret.